vendredi 31 juillet 2009

La Haute-Savoie : Pour une stratégie à long terme pour sortir des crises

Je viens de poster une réponse sur les blogs de Sonia CHAMOSSET et d’Astrid BAUD conseillère générale de la Région Rhône-Alpes dans le mesure où elles ont publiée les mêmes statistiques des actions du plan de relance en Haute-Savoie. Les chiffres sont le reflet d’une vision à très court terme qui doit être complétée par des actions à plus long terme pour créer les emplois de demain car la situation économique de la Haute-Savoie peut être comparée à une bombe à retardement à plus d'un titre. Certe, les effets de la crise financière ont détourné une partie de la clientèle des stations (principalement les anglais), mais ce phénomène conjoncturel masque aussi des changements structurels beaucoup plus importants :

- 200'000 emplois privés et +60'000 en suisse soit 23%. Si nos amis helvètes doivent faire face à des difficultés...alors le chômage va exploser chez nous…et je travaille à Genève où certains partis ont inscrit dans leur programme électoral la lutte contre le travail frontalier !

- 8% des emplois seulement concernent le tourisme (12% du PIB) alors que notre département est l’un des plus actifs en France en ce domaine. Malgré un bon enneigement cette année, l'activité hivernale à baissée (-3,4% source étude Comète) et le réchauffement climatique n'est pas un phénomène conjoncturel. L’activité estivale est en baisse constante depuis plusieurs années, la montagne n’étant plus « tendance ».

- L'activité du pôle de compétitivité Arve Industrie est beaucoup trop restreinte pour stopper les réductions d'effectifs dans le décolletage mais aussi dans l’ensemble de l’industrie (SNR, Tefal,…) et là encore, il s’agit d’un mouvement de fond qui concerne l’ensemble des pays dit industrialisé qui voient leurs outils de production partir en Asie.

- Le secteur tertiaire pourrait s’en sortir un peu mieux. Le pôle de compétitivité IMMAGINOVE est source de création de startups dont l’ambition reste également trop limitée pour être une véritable source de création d’emploi. Etant membre de SAVOIE ANGELS, nous avons permis à des startups régionales d’obtenir plus de 2 Mios d’euros de fonds propres, mais la loi de finance modificative de 2009 est venu restreindre les possibilités d’investissement. Un récent appel à projet de DGCIS doté de 30 Mios d’euros pour stimuler les activités du web innovant dont 10 pour le web 2.0 excluait de facto les entreprises provinciales car les seuls pôles de compétitivité susceptibles de labelliser les projets sont en Ile de France (CAP Digital & Systematics). Espérons qu’IMMAGINOVE ait pu stimuler ses membres à répondre au titre des projets « Serious Games » qui ont partiellement recours aux mêmes technologies que celles utilisées pour les films d’animation que nous connaissons bien en Haute-Savoie. Le pôle SPORTALTEC est en sursis.

Encore faut-il que nous ayons une infrastructure de communication adaptée…et ce n’est pas en prenant la décision d’équiper le département en fil de cuivre (décision récente) que nous pourrons supporter le développement du télétravail et multiplier les emplois du secteur tertiaire.

Aujourd’hui, l’essentiel des réflexions portent sur le cours terme, et les possibilités d’actions des politiques sont très limitées en ce domaine. Je n’ai pas encore eu l’opportunité d’entendre ou lire une vraie réflexion à long terme qui permettrait d’élaborer des scénarios d’évolution des industries présentes sur le territoire.

Jean-Claude MORAND 31/7/09

jeudi 23 juillet 2009

Une étape du Tour de France intéresse t'elle les touristes internautes ?

Fabuleuse promotion pour le tourisme haut-savoyard aujourd'hui à l'occasion de l'épreuve contre la montre du Tour de France. La météo n'était pas au top pour les marchands de glace mais ils vont se rattraper avec l'anticyclone qui s'annonce. Cela dit, j'ai été impressionné par l'organisation mise en place depuis des semaines. Mais quel impact le passage du Tour aura-t'il ? Pour les internautes, ce n'est pas évident s'il en croit Google Trends en analysant les mots clefs des villes candidates au JO de 2018.

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Pour notre comparaison avec les requêtes sur l’expression « Grenoble », « Annecy » reste bien en deçà des requêtes formulées pour la capitale dauphinoise. Il apparaît que la présence du Tour n’ait pas vraiment motivé les internautes. En revanche, la courbe du bas analyse la présence des expressions sélectionnées dans les dépêches de la presse. Là, nous pouvons observer que depuis une semaine, un accroissement notable de la présence du nom de la ville étape dans la presse.

Cette statistique démontre aussi que nos amis suisses sont les premiers à chercher des informations sur la ville, suivis des néerlandais et belges traditionnellement de fervents supporters du Tour de France. Les autres nations ne sont que très faiblement représentées. Alors, j’en déduis sans doute trop rapidement, qu’un événement comme le Tour propose effectivement des images aux télévisions du monde entier mais, il n’est pas certain que les consommateurs/touristes mémorisent le nom de la ville comme une destination de vacances potentielle. Je vais reprendre ce graph dans quelques jours pour voir si ce pique retombe

Je suis un peu surpris d’observer aussi peu de requêtes en provenance des Etats-Unis compte tenu de la présence en tête du classement de Lance AMSTRONG. Je ne suis pas dans le secret de l’organisation de cet événement, mais il est absolument nécessaire, qu’il doit être accompagné d’une opération de promotion sur les marchés cibles comme le fait le Valais avec l’étape de Martigny (Voir la pub ci-dessous largement diffusée sur les écrans de FR2 et FR3).

Qu’en pensez-vous ?

Jean-Claude MORAND 23/7/09

mercredi 15 juillet 2009

Pour un pôle de compétitivité "Tourisme"

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Dans une interview de Remi CHARMETANT Directeur de Savoie Mont-Blanc, du 5 juillet celui-ci évoque la création d’un pôle de compétitivité « Tourisme ». Je défends avec mes faibles moyens d’expert cette idée depuis plusieurs années. Conjointement avec Cécile ALVERGNAT – Secrétaire Générale du Réseau des Echangeurs – nous avions même envisagé la création d’une antenne spécialisée sur le Tourisme. Un projet similaire avait été imaginé en région PACA sous l’impulsion d’IBM. Le CNAM utilise en ce moment toute sa force de lobbying parisienne pour se positionner sur ce thème avec un projet d’ Institut Français du Tourisme.

Alors, même si la création de nouveaux pôles de compétitivité est gélée pour les trois prochaines années (2009-2011) il n'en reste pas moins vrai que 1,5 milliard d’euros sont affectés par le Gouvernement pour les pôles de compétitivité durant cette période. Alors pourquoi pas un 72ème pôle pour le tourisme ou la refonte d'un pôle existant ? Je supporte entièrement l’idée d’un pôle de compétitivité « Tourisme » qui pourrait s’appuyer sur les fédérations professionnelles (SNTF, SNMSF, Associations de stations et d’hôteliers, FNOTSI) mais aussi de grands acteurs comme la Compagnie du Mont-Blanc, la Compagnie des Alpes ou le groupe Accor qui supporte à la fois l’Institut Français du Tourisme et l’Ecole Hôtelière de Lausanne. La présence de 3 grandes écoles hôtelières (Glion, Les Roches, EHL) du top 10 mondial à moins d’une heure de route d’Annecy est aussi une opportunité qui pourrait donner une vraie dimension internationale à ce pôle de compétitivité tout en lui procurant des financements européens. AMADEUS et GALILEO, les leaders des systèmes GDS européens pourraient aussi participer à cette aventure pour le grand bien des étudiants du Master Tourisme de Chambéry qui en fin de scolarité ne sont exposé à aucun de ces systèmes de réservation. Que dire alors de la connaissance des standards XML internationaux tel que ceux promus par l’Open Travel Alliance (OTA) trop occultés par les approches franco-françaises voir régionales de l’XFT ou SITRA même si ce dernier développe maintenant des accords avec les grands du voyage en ligne comme Tripadvisor.

J’ajoute que cela pourrait être une motivation supplémentaire pour intensifier l’action d’un incubateur comme GRAIN pour stimuler la recherche en ce domaine à l’Université de Savoie et/ou à l’ESC de Chambéry. Par ailleurs, les structures de financement comme Léman Angels et Savoie Angels pourraient être des partenaires financiers d’un Pôle de compétitivité « Tourisme » comme ils le sont pour SPORALTEC ou TERNERRDIS afin d’apporter les fonds propres et les conseils aux nombreux créateurs d’entreprises qui souhaitent se lancer dans ce secteur.

A l’heure ou le marché anglais s’effondre à l’image de la monnaie de ce pays, tous les yeux des opérateurs sont tournés vers les pays émergeants que sont l’Inde, la Chine, ou encore les pays du Moyen-Orient. Tous les processus et approches actuelles sont remis en cause avec l’arrivée de ces nouveaux clients. Des produits qu’il est nécessaire d’adapter, aux employés qui ne peuvent plus se contenter de parler une langue européenne pour satisfaire le chaland en passant par les canaux de communication et de ventes qui ne sont plus du tout les mêmes. Tout est à reconsidérer ! Le conseil scientifique d’un tel pôle de compétitivité serait alors un excellent conseil pour les élus. Par exemple dans le domaine des technologie (Je réagi, ici à une information qui reste à vérifier selon laquelle le département de la Haute-Savoie aurait récemment opté pour une infrastructure de réseau basé sur des liasons « cuivre » en lieu et place de la fibre optique plus onéreuse à installer mais bien plus performante) est la marque d’une méconnaissance de la manière dont on peut rentabiliser de tels investissements car l’industrie touristique est fortement consommatrice de bande passante. Les vidéos, les images, l’accès aux bases de données à distance sont les outils de promotion d’aujourd’hui. Les clients arrivent de plus en plus souvent avec leur PC dans leurs bagages pour rester connecté avec leur monde à nous de leur offrir des vitesse de transmission identiques à celles qu’ils connaissent dans leur environnement.
Un pôle de compétitivité est un fantastique outil pour décloisonner les acteurs de cette industrie comme le déclarait Jean-Jacques DESCAMPS – Co-Président de l’IFT lors d’une session dédiée à la recherche dans ce secteur industriel : « les changements économiques, technologiques et culturels qui touchent toutes les activités du tourisme exigent plus que jamais la professionnalisation et l’internationalisation de ses métiers et l’excellence de ses entreprises » - point de vue que je reprenais dans un billet dédié à la recherche en tourisme. Positionner cet outil dans les Pays de Savoie en recherchant des synergies avec nos voisins suisses et italiens qui sont confrontés aux mêmes défis est une opportunité non seulement pour les acteurs locaux, mais pour l’ensemble de l’industrie touristique.

Il est évident que la dynamique générée par un pôle de compétitivité est un atout pour innover et ainsi maintenir et créer les emplois de demain quelques soit les évolutions climatiques ou économiques même si le Tourisme représente que ~12% du PIB des Savoie et 6,2% de celui de la France.

Jean-Claude MORAND – 15 juillet 2009

samedi 11 juillet 2009

Un vrai TGV à Annecy. Oui, mais pas uniquement pour les JO

TGV PSE at Gare de Lyon par Matthew Black

Vous êtes nombreux, en Haute-Savoie, à souhaiter qu’un vrai TGV arrive à Annecy et presque autant à penser que les JO sont la seule solution pour que les investissements nécessaires à cette infrastructure soient décidés. Je fais bien entendu partis de ceux qui pensent qu’il est inacceptable de mettre autant de temps pour relier Lyon à la capitale haut-savoyarde. Mais pourquoi faut-il invoquer une manifestation de 15 jours pour cela ? Les activités touristiques, très médiatisées, ne représentent que 12 % du PIB des Savoie. 88 % de ce PIB est donc lié à d’autres flux. Combien sommes-nous à devoir nous rendre à Paris tous les mois de l’année en prenant le TGV de 5 h 32 pour arriver à 9 h 15 ? N’est-il pas plus judicieux de revendiquer une infrastructure digne de ce nom pour soutenir l’industrie dans son ensemble et le secteur tertiaire en forte progression ? N’avons-nous pas des pôles de compétitivité (Imaginove, Sporaltec, Arve Industries Haute-Savoie Mont-Blanc, Minalogic) sensés donner une impulsion économique à des secteurs stratégiques de notre industrie. Le seul lié aux activités couvertes par les JO est SPORALTEC dont le siège est à Saint-Etienne. Il a perdu sa labellisation faute d’une activité suffisante. Malgré les déboires de Salomon et de Dynastar dans notre département, il reste toutefois quelques usines génératrices d’emplois stimulatrices l’activité économique. L’agence économique départementale évalue « qu’en Haute-Savoie, on compte une dizaine d’établissements dédiés à la fabrication d’articles et de matériels soit près de 1600 salariés, des fabricants de vêtements et plus de 370 commerces de détails spécialisés (employant plus de 2000 salariés) ». Les premiers employeurs privés restent Entremont, les Eaux d’Evian, SOPRA, SOMFY, SNR, Staubli, Provencia, Crédit Agricole, TEFAL… pas beaucoup d’employeurs touristiques de grande envergure à l’exception de la Compagnie du Mont-Blanc à Chamonix (220 permanents et plus de 400 employés en saison).

Si selon les statistiques du Conseil Général l’économie haut-savoyarde offre plus de 200’000 emplois privés, plus de 66000 frontaliers viennent s’ajouter à ce chiffre, soit plus de 266000 emplois.


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C’est pour tous ces emplois que nous devons nous battre pour que des liaisons avec les principales capitales européennes soient les plus rapides possible et non parce que quelques milliers de visiteurs viendront passer 15 jours dans neuf ans au pied des pistes. C’est aujourd’hui que le chômage à monté de 90% dans la vallée de l’Arve et c’est aussi cette année que TEFAL à renvoyé ces intérimaires à la maison ! Alors si les ~21000 employés du secteur touristique (toujours selon les statistiques du Conseil Général) représentant 8% de l’emploi dans le département méritent une attention particulière, il faut garder la mesure de la proportion en n’oubliant pas les 92 % des postes de travail fournis par les autres secteurs économiques. Où est le potentiel de création d’emplois supplémentaire ou tout simplement de maintien des postes de travail ? Dans l’industrie touristique qui observe la fonte des glaciers et la réduction de la durée de la présence du manteau neigeux à 1500m qui serait réduite d’un mois sous les assauts du réchauffement climatique ? Combien de stations de sports d’hiver auront eu le même destin qu’Abondance en 2038 lorsque les prêts souscrits pour financer les équipements auront enfin été remboursés ?

Sur le plan de l’organisation des transports pour une manifestation comme celle des JO, il est certes intéressant de pouvoir proposer une liaison ferroviaire performante, mais si vous êtes un anglais, allemand, autrichiens, américain ou japonais quel moyen de transport allez-vous utiliser ? Probablement pas le train, mais plus sûrement l’avion jusqu’à Genève ou la voiture qui reste encore le meilleur moyen pour relier Munich ou Innsbruck à Annecy.

Pour toutes ces raisons, je reste très favorable à la création d’une vraie ligne de TGV jusqu’à Annecy. Mais la motivation ne pas être liée à l’hypothétique obtention des JO, mais tout simplement à la nécessité de créer et maintenir une activité économique digne de ce nom en Haute-Savoie.

Je crains que l’utilisation du seul argument des JO pour obtenir un "vrai" TGV et toute autre infrastructure soit une porte ouverte pour invoquer un refus en cas de non-sélection de notre région pour cette manifestation et maintiendrait donc notre tortillard pour de nombreuses années.

Jean-Claude MORAND 11/7/09

La photo est de Mathew BLACK prise à la Gare de Lyon